Sauver les forêts africaines
L ’opinion commune est que les forêts diminuent constamment partout dans le monde. Ce point de vue s’appuie notamment sur les analyses des organisations non gouvernementales attachées à la protection de la nature et au maintien de la biodiversité, comme c’est le cas du « Fonds mondial pour la nature » (WWF), très impliqué dans le développement durable. Il s’avère cependant que la déforestation peut laisser la place à une reforestation parfois très importante, comme on le voit en France. La FAO * observe que « presque tous les pays et les régions qui ont connu un essor économique ont eu des taux de déforestation élevés pendant la phase de transition économique. Heureusement, dès que l’économie nationale atteint un certain niveau de développement, la plupart des pays sont arrivés à arrêter, voire à inverser, la déforestation ».
Aujourd’hui, les forêts couvrent environ 4 milliards d’hectares, soit quelque 31 % des terres de la planète. La déforestation continue à sévir dans les zones tropicales, où les populations vivent de l’exploitation de toutes les ressources foncières. En Afrique subsaharienne, la déforestation a accompagné la croissance démographique, en particulier avec l’augmentation des besoins en bois de chauffe en zone soudano-sahélienne et l’extension des défrichements requis par les méthodes de l’agriculture itinérante en zone équatoriale. Dans cette partie de l’Afrique s’est ajoutée la production des cultures industrielles – café, cacao, palmier à huile, hévéa - pour les marchés extérieurs et, plus récemment, les achats de terres à grande échelle par des investisseurs étrangers ont accéléré le processus de déforestation.
► Les bienfaits économiques de la forêt
► Vers la reconquête des forêts africaines
Les autorités ont pris conscience des ravages de la déforestation et pris des mesures qui permettent une exploitation plus raisonnable des forêts.
Au Gabon, le secteur forestier représente 6 % du PIB hors hydrocarbures. Seconde source de revenus étrangers du pays, il est le premier employeur privé et génère quelque 20 000 emplois directs et indirects. Le gouvernement a décidé d’améliorer la part locale de valeur ajoutée de cette ressource et de développer l’emploi, en interdisant, en janvier 2010, les exportations de bois non transformé. Par ailleurs, la Caisse des Dépôts et Consignations du Gabon vient de prendre 35 % du capital de la société Rougier Afrique International, qui bénéficie de plus de deux millions d’hectares de concessions forestières certifiées réparties entre le Gabon, le Cameroun et la République du Congo.
Au Cameroun, le commerce du bois représente une contribution de 6 % au PIB, et là encore des mesures de protection et d’incitation à la production locale ont été prises pour améliorer la gestion et les revenus locaux de l’exploitation. Des limitations d'exportation sont imposées au commerce des grumes, afin d’encourager la transformation locale et des essences précieuses, comme le Bubinga, le Wengue, l'Iroko et le Tali, y ont même été interdites de commercialisation.
« Les forêts et la foresterie sont des actifs de plus en plus attrayants pour les investissements du secteur bancaire, des fonds de pension, des fonds de dotation, des fondations et des compagnies d’assurance » (FAO). Les responsables africains ont compris les avantages et les risques de cette évolution, ils ont commencé à protéger la ressource et à prendre des mesures en faveur de l’emploi et de l’augmentation de la valeur ajoutée produite sur place, mais le chemin pour y parvenir est long alors que le temps du développement presse.■
Jean Roch
* Rapport sur la Situation des forêts du monde, 2012, FAO.